Cigarette

Cigarette.
Même le mot a un je ne sais quoi d’élégance. J’en rêve. Juste une cigarette avec un verre de vin, un mojito ou même sans rien. Pour me souvenir de ce que ça fait.
Une bouffée pour me faire mal, me rappeler quand j’étais libre, rebelle et un peu conne. Mes poumons déjà fragiles, comme s’ils avaient besoin de ça.
Inspirer la fumée, la saveur du tabac et son arrière-goût goudronné. Garder cette odeur sur les doigts, les vêtements, les cheveux, empester le tabac froid, la vieille odeur de cendrier.
Quelques bouffées pour ressentir, me sentir à l’intérieur.
Curieux, cette tendance à se faire mal. Pourtant c’est anodin, tout le monde le fait. Fumer une cigarette, c’est presque naturel, automatique. Et quand j’en sens fumer près de moi, j’inspirerai presque à pleins poumons. C’est comme une gourmandise, un pêché inassouvi. Comme manger, bouffer pour compenser, avaler engloutir, chercher une contenance mais c’est pas le même geste. Juste une façon de se remplir, comme si c’était mort et qu’il fallait se sentir vivre. Comme si le cœur qui bat, ça ne suffisait pas.
J’en rêve la nuit. Je fume et me dis « Merde, voilà, t’as tout foutu en l’air, tes efforts foutus par terre… »
Le diable me tente et cherche un alibi à ma chute, il voudrait me tirer vers le bas, la déchéance avec ceux qui se laissent aller, complètement aller, dans le vice… J’allais dire que c’est passif mais c’est faux. Il faut de l’énergie pour se foutre en l’air même à petit feu.
Je me souviens des cigarettes allumées nonchalamment, pendant un rendez-vous, après un cours. Bizarrement, ça m’obligeait à respirer, relâcher la pression accumulée. Je me souviens des premières bouffées qui écorchaient ma gorge, asphyxiaient mes poumons, donnaient la nausée. Je faisais comme tout le monde, j’avais besoin d’une contenance. Stupidité. Et en terrasse ça fait plus classe, quand tu bois un verre en refaisant le monde, ou quand tu t’emmerdes, aussi.

Andréa Jiny Cloud
08/05/2018

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